Alcatel-Lucent : c'est la faute à qui ?

le 14/10/2013, par Didier Barathon, Fournisseurs, 770 mots

Aucun consultant ne veut parler de la situation d'Alcatel-Lucent après le nouveau plan de réduction des coûts annoncé le 8 octobre. Présenté comme le plan de la dernière chance, il ne dit rien des causes des difficultés actuelles que l'on peut résumer en cinq questions.

Alcatel-Lucent : c'est la faute à qui ?

La faute aux constructeurs chinois ?

C'est toujours la première explication qui vient à l'esprit. Elle n'est pas fausse, mais elle est trompeuse. Huawei et ZTE équipent les opérateurs français, parce qu'on les a laissés entrer.  Et c'est tout le problème.

Le directeur général (français) de la filiale française d'un industriel allemand, nous explique que, même plus cher, une entreprise allemande opte toujours pour un fournisseur allemand. La filiale allemande d'un allemand fera ce choix. Une américaine aussi. Avec des soutiens massifs de leurs ambassades qui organisentla conquête. Lafiliale française à l'étranger d'un industriel français se passera des consignes de Paris, si consigne il y a.

Le pré-carré national n'a pas été défendu, mais il est maintenant trop tard. Ironie du sort, Huawei a installé à Lannion, fief des télécoms en France, un centre de R&D en 2007.

La faute du (des) gouvernement(s) ?

On entend le gouvernement actuel sur la nécessité de négocier le plan social. Dans le cadre de la nouvelle loi sur la sécurité de l'emploi, les syndicats doivent en effet donner un accord majoritaire à un tel plan. Ensuite, le gouvernement doit l'agréer.

Jusqu'alors, le gouvernement actuel ne semble guère plus directif que ses prédecesseurs. Les syndicats se souviennent encore du mois de janvier dernier où ils ont fait le siège de Matignon pour qu'il intervienne et empêche Alcatel-Lucent de mettre ses brevets en gage. Mais, le gouvernement n'a rien imposé. Il semble depuis intervenir pour empêcher la vente des câbles sous-marins, considérés du point de vue de la défense nationale comme non négociables.

A moins qu'obligée de négocier le plan social, dans le cadre de la nouvelle loi, la direction actuelle d'Alcatel-Lucent ne négocie aussi des cessions d'actifs, très discrètement, avec l'appui du gouvernement, en étant obligée d'aller très vite sur les deux points, pressée par une situation délicate.

La faute à Serge Tchuruk ?

Serge Tchuruk est resté onze ans chez Alcatel. Il l'a débord recentrée sur les télécoms, se débarrassant du reste : transport ferroviaire, centrales électriques et médias, bref de l'héritage de Pierre Suard.

Aujourd'hui, sept ans après son départ, Serge Tchuruk garde la cote comme cible préférée dans le monde des télécoms. On lui reproche moins le rachat de Lucent que les difficultés à intégrer les deux entreprises. Les cendriers et les dossiers qui volent dans son bureau font partie dela légende. Lavenue de Patricia Russo en France avec des habitudes et des émoluments des dirigeants américains n'est pas passée inaperçue. Plus sérieusement, il est accusé d'avoir tué l'entreprise et propagé le concept de « fabless », d'entreprise sans usine, ce qui aurait accéléré la désindustrialisation en France.

La faute au plan actuel ?

Il est évidemment un peu tôt pour apprécier la gestion de Michel Combes, arrivé aux manettes début avril. Qui se situe dans la continuité de son prédecesseur, mais avec une application rapide et strict de son plan et maintenant son amplification. Michel Combes ne dit rien d'éventuelles cessions dont rêvent les boursiers. Il insiste simplement, et c'est le sens de l'annonce du 8 octobre, sur des coûts encore trop importants, en portant l'effort sur la masse salariale. Les syndicats parlent déjà de salariés qui payent « les erreurs de stratégie » de la direction, en fait des directions successives.

Michel Combes passera-t-il à la vitesse supérieure en mettant en vente les câbles sous-marins (400 ME de CA), la partie entreprises (800), l'accès mobile (4 milliards d'euros) ? C'est la grande interrogation, de celle qui donne encore des sueurs froides sur la suite des évènements.

La faute au mariage avec Lucent ?

En 2006, Alcatel fusionne avec l'américain Lucent. S'en suivent des années de démarches pour effectivement fusionner les deux entités. Un raidissement côté américain devant l'intrusion d'un français à un tel niveau. Un raidissement comparable côté français devant le comportement de Patricia Russo. Michel Combes a calmé le jeu, remis un peu de français dans les comités de direction. Sur le fond peu de monde conteste la nécessité de la fusion pour créer un géant mondial. Mais cette fusion là s'est mal passée. Les grands cabinets de conseil qui ont suggéré et réalisé la fusion n'ont pas participé à l'étape suivante : la réalisation de cette fusion, on sait que c'est toujours la partie la plus délicate.

Par comparaison, le canadien Aastra en reprenant successivement des divisions de Nortel, Ericsson et EADS Telecom a tenu son pari. En revanche, Nokia et Ericsson, alliés en 2006, on dénoué cet accord.

 

 

Combien de suppressions d'emplois ?

Alcatel-Lucent supprime 10 000 emplois nets (sur un total de 72000), précise le communiqué publié à l'issue de la réunion mardi matin 8 octobre du comité de groupe européen. Le mot net est important. En fait le groupe procède à 15 00 suppressions de postes, mais aussi à 5 000 embauches. 

Le chiffre des 10 000 pourrait être plus élevé. Un exemple simple, celui de la France, 900 suppressions de postes sont annoncées, mais à côté se profilent 900 mutations internes et  transferts vers des entreprises partenaires. Si des personnes refusent ces transferts, aux 900 suppressions nets s'additionneront d'autres départs.

Les 900 suppressions se feront dans les fonctions support, administration et commercial.

200 créations de postes sont également prévues en France.

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