La 5G doit encore convaincre les entreprises et les utilisateurs

le 02/10/2018, par Mike Elgan, IDG NS (adapté par Jean Elyan), GSM/3G/4G, 1547 mots

Si la 5G promet des connexions sans fil 20 fois plus rapides, les risques d'être déçus sont réels et ne manquent pas. Tour d'horizon des problèmes d'une technologie attendue au tournant.

La 5G doit encore convaincre les entreprises et les utilisateurs

Tout le monde attend beaucoup de la technologie 5G : elle doit sécuriser la conduite autonome, permettre la diffusion en continu de la réalité virtuelle, servir de support à la chirurgie longue distance, rendre possible les appels vidéo holographiques en 3D, faire chuter le prix des smartphones autour de 50 euros et ramener la semaine de travail à quatre heures. La 5G doit aussi ouvrir la voie de l'entreprise en temps réel (RTE) et transformer radicalement son fonctionnement. Enfin, les entreprises qui développent la technologie 5G affirment que les vitesses 5G réelles seront 10 à 20 fois plus rapides que les vitesses 4G qui plafonnent actuellement entre 100 et 200 Mbits/sec.

Mais, plus important encore, la 5G promet une latence beaucoup plus faible - de 1 milliseconde environ contre 20 millisecondes pour les réseaux actuels - ce qui signifie que toutes les opérations traitées dans le cloud seront plus réactives et que les appels vidéo seront de bien meilleure qualité. Mieux encore, de nouveaux téléphones 5G arriveront sur le marché dès l'an prochain, ce qui veut dire qu'il sera possible de profiter de tous ces avantages dans un délai très court. Formidable ! Une nouvelle ère pointe à l'horizon ! Malheureusement, la réalité est très différente, car tout ce que promet la 5G n'arrivera pas de sitôt. Mais avant d'expliquer pourquoi, voyons comment et quand la 5G sera disponible et quels matériels en seront équipés, en commençant par les mobiles.

Des mobiles 5G bientôt sur le marché Actuellement, le Moto Z3 de Motorola est le seul téléphone qu'il sera possible de mettre à niveau en 5G. Pour cela, il faudra l'équiper de l'extension 5G Moto Mod, qui, soit dit en passant, fait plus que doubler l'épaisseur du téléphone. N'empêche que, techniquement, on peut dire qu'il y a déjà sur le marché un mobile capable de prendre en charge la 5G. Concernant les autres constructeurs, Xiaomi pourrait lancer son smartphone Mi Mix 3 5G le mois prochain et Oppo devrait livrer un OnePlus 7 compatible 5G en janvier. Sprint et LG ont conclu un partenariat pour livrer un téléphone 5G fonctionnant exclusivement sur le réseau Sprint. Ce mobile est programmé pour le premier semestre de l'année prochaine. Huawei devrait aussi lancer des smartphones pliables compatibles 5G d'ici l'été. Si Apple n'a fait aucune annonce concernant la 5G, des entreprises comme Mobile Viewpoint travaillent sur des extensions qui permettraient aux iPhone existants (et aux téléphones Android) de supporter la 5G. La plupart ou tous les smartphones haut de gamme devraient prendre en charge la 5G d'ici 2022. Et d'ici 2025, dans le monde industrialisé, la plupart des utilisateurs de smartphones devraient avoir des mobiles 5G. Donc, très bientôt, nous aurons tous des téléphones 5G. Mais, cela ne signifie pas pour autant que nous profiterons des avantages de la technologie 5G...

La remarque de l'auteur de science-fiction William Gibson selon laquelle « l'avenir est déjà là, mais qu'il ne se manifeste pas partout de la même manière », décrit particulièrement bien la situation de la 5G. Depuis le début du mois, le Los Angeles Convention Center, un centre de conférence appartenant à la ville de Los Angeles, est doté d'un réseau sans fil 5G permanent. C'est le premier lieu des États-Unis à offrir la technologie. L'opérateur britannique EE qui teste déjà la 5G à Londres prévoit de déployer la couverture 5G dans la ville l'année prochaine ou l'année suivante. T-Mobile promet aussi de lancer la 5G dans 30 villes américaines l'an prochain, et Sprint dans six villes. La Chine et la Corée du Sud prévoient également de lancer la 5G l'an prochain. En France, Bouygues Telecom réalise des tests à Bordeaux et Lyon, tandis qu'Orange Orange lance des tests dans le quartier de l'Opéra à Paris, sur son campus de Châtillon et à Linas-Monthéry, en Essonne, en plus de Lille et DouaiMalheureusement, ces déploiements masquent une réalité bien différente. En effet, quand les opérateurs promettent des déploiements dans les villes, on imagine facilement une couverture à l'échelle de la ville. Mais ce n'est pas comme ça que fonctionne la 5G.

Une technologie complexe Il est important de noter que la 5G ne désigne pas une seule technologie, mais un ensemble complexe de technologies, dont plusieurs n'ont pas encore été validées par les organismes de standardisation. Néanmoins, une certaine simplification permet d'expliquer plus facilement le fonctionnement de la 5G. Donc, les technologies 5G permettent d'utiliser de très hautes fréquences. Plus la fréquence est élevée, plus la longueur d'onde est courte. Des longueurs d'onde plus courtes permettent des vitesses plus rapides et une latence plus faible. Mais il y a un piège : avec des longueurs d'onde plus courtes, la distance entre l'appareil et la « tour » doit être beaucoup plus courte. Par ailleurs, ce signal a plus de mal à traverser des matériaux comme les murs et les arbres. Pour contourner ces obstacles, les entreprises doivent déployer beaucoup plus de tours qu'avec les technologies existantes. Des entreprises comme Verizon utilisent la technologie de formation de faisceaux pour faire passer le signal autour des objets et le diriger vers les appareils.

Pour disposer d'une couverture acceptable, les opérateurs doivent déployer un grand nombre d'antennes 5G et construire des tours partout, en les positionnant très près des utilisateurs. Il faudra du temps et beaucoup d'argent pour installer ces appareils partout. De sorte que les déploiements seront lents et inégaux. Quand des opérateurs comme Sprint, T-Mobile et Verizon disent qu'ils vont déployer la 5G dans une ville, il faut comprendre que la 5G sera disponible dans certains secteurs limités de la ville. Parce que les connexions 5G consomment plus d'énergie, les puces qui alimentent la 5G seront conçues pour privilégier la 4G et ne passeront en mode 5G uniquement quand l'application exigera une bande passante élevée. Pour économiser la batterie, à cause du nombre limité d'antennes et de tours, et en raison des problèmes d'interférences, nos futurs smartphones 5G devront surmonter d'énormes obstacles avant d'effectuer des connexions 5G.

Des craintes sur la santé Soyons très clairs : dans cinq ans, nos smartphones utiliseront la 4G presque tout le temps, même si l'on dispose d'un mobile 5G et que l'on vit dans une ville « équipée » en 5G. Il y aura très peu de réseaux 5G fiables, et ils ne seront pas souvent disponibles pendant nos déplacements. La 5G stable, rapide et fiable dont tout le monde parle ne sera disponible que dans certains bureaux, dans des lieux de divertissement et ailleurs, mais elle ne sera pas accessible partout. Les fournisseurs de services sans fil espèrent que la technologie 5G leur permettra de concurrencer ou de remplacer les FAI, les câblo-opérateurs et les entreprises de télévision et de services Internet par satellite. Soit. Mais, en terme d'usage, il faudra probablement plus de 15 ans avant que la 5G ne remplace la 4G pour la plupart des utilisateurs. La 5G ne sera pas suffisamment fiable de sitôt pour que des entreprises comme Apple et Samsung suppriment de leurs smartphones les puissants composants de traitement et qu'elles migrent toutes les opérations vers le cloud. Il y a donc de fortes chances pour que les smartphones à plus de 1 000 euros continuent à alimenter le marché. Et compte tenu du mode de fonctionnement de la 5G, les déploiements se heurteront bientôt à un autre obstacle de taille.

Cette semaine, Americans for Responsible Technology, une coalition regroupant 52 associations, a demandé à la Federal Communications Commission (FCC) de ralentir le déploiement des infrastructures 5G le temps d'examiner ses effets potentiels sur la santé. Ces associations mettent en avant « un lien entre l'exposition aux rayonnements radiofréquences et micro-ondes et les graves atteintes biologiques ». Des villes, dont Mill Valley, en Californie, votent déjà des lois pour stopper les installations 5G. Cela fait des décennies que la question de la nocivité des antennes de smartphones et même du WiFi sur la santé humaine est débattue. Mais le cas de la 5G est différent. En effet, pour mettre en place cette technologie, il faut installer beaucoup plus de tours et les positionner beaucoup plus près des utilisateurs. Dans la ville de North Potomac, Maryland, des habitants ont décompté la présence de plus de 60 tours sans fil 5G à moins de dix mètres de leurs portes d'entrée.

Des années de déploiement

Des scientifiques apporteront peut-être la preuve définitive que l'équipement sans fil 5G représente un risque pour la santé. D'ici là, le débat sur les effets sur la santé se poursuivra. Et il est peu probable qu'un jour, tout le monde s'entende pour dire que la 5G est inoffensive. Cela pose plusieurs questions, notamment : quelle sera l'ampleur de cette opposition à la 5G et dans quelle mesure pourra-t-elle retarder les déploiements de la technologie ? Une action politique anti-5G pourrait sérieusement ralentir les déploiements à grande échelle et repousser la mise à disposition de la technologie de plusieurs années, voire de décennies. Bien au-delà de ce qu'imaginent les plus optimistes promoteurs de la technologie. Alors, s'il y a bien quelque chose à retenir de cet article, c'est que tous les scénarios enthousiastes sur le monde merveilleux de la 5G et son proche avènement ne sont tout simplement pas réalistes, car pendant la prochaine décennie, au moins, les possibilités de connectivité à un réseau 5G seront très rares.

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