Les glissements sémantiques et la sécurité-alibi

le 16/09/2006, par Marc Olanié, , 410 mots

Le Cato Institute, sous la plume de Timothy Lynch, publie un essai intitulé : « Doublespeak and the War on Terrorism ». Si, de prime abord, le sujet est assez éloigné des considérations bassement informaticiennes, son éclairage est riche d'enseignements quand au développement politico-économique du secteur de la sécurité. Il explique également comment des mesures d'exceptions impensables à « faire passer » en temps normal, parviennent à s'imposer sous prétexte de menaces terroristes, d'actes de piraterie ou d'atteintes au tissu industriel national. Il n'est là question ni d'excuser la délinquance, ni d'accepter les idées simplistes d'un monde manichéen où la raison du Bien et de l'Intérêt Général d'une minorité l'emportent sur la liberté du particulier, même si ce particulier exprime majoritairement un avis contraire. Mais revenons à l'étude de Lynch. L'analyse porte essentiellement sur l'usage systématique de mots forts et lourds de sous-entendus -terrorisme, volonté de tuer les citoyens américains, axe du mal...- lorsqu'il s'agit de défendre la position du camp national, et de faire appel à des termes péjoratifs dès que l'on qualifie les actes de la partie adverse. Un principe dialectique caractéristique des régimes totalitaires soit dit en passant, mais utilisé dans un pays à structure démocratique. Ainsi, un triple suicide par désespoir dans les geôles de Guantanamo se transforme en « act of asymmetrical warfare against the American military », l'interrogatoire musclé d'un manifestant par un flic de quartier s'appelle un « debriefing », et ce même mot, debriefing, utilisé par un agent de la CIA en opération, prend une résonnance légèrement plus sinistre. Autre exemple, lorsque la phraséologie des lettres d'information pro-gouvernementales utilise les ressorts des commandements bibliques, qui oserait les contredire sans passer pour anti-américain et suppôt des forces de « l'axe du mal » ? Pendant ce temps, la censure accentue ses pressions, invoquant le fait qu'une publication -y compris le célèbre rapport de l'ACLU- ne peut mettre en péril la sécurité d'état sous prétexte de liberté d'expression. Paradoxalement, c'est au nom de la défense de la Liberté que la Maison Blanche justifie des mesures de plus en plus liberticides, y compris envers les citoyens américains. Les formules consacrées et idées formatées, l'invocation des intérêts supérieurs, l'abus d'euphémismes et autres glissements sémantiques sont violement dénoncées par le Rapport Lynch. Mais combien verront, dans ce rapport, autre chose qu'un pamphlet ou une charge antigouvernementale ? Le véritable message du Cato Institute, c'est de prendre garde au véritable sens des mots, de faire l'effort de ne céder ni à la démagogie, ni à la facilité de son vocabulaire.

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