Une émergence inéluctable

Dossier par Christophe Bardy, 975 mots

Après environ dix ans d'incubation, la migration vers la téléphonie sur IP s'impose, jour après jour, comme inéluctable pour la plupart des entreprises. Obsolescence des matériels existants, réduction des coûts, consolidation de systèmes hétérogènes suite à une fusion ou à un déménagement ou, plus prosaïquement, disparition du catalogue des constructeurs des systèmes de centraux téléphoniques TDM traditionnels, les raisons sont multiples qui poussent les entreprises à adopter la technologie de la téléphonie sur IP.
La bonne nouvelle pour toutes ces entreprises est qu'après ces dix années de développements et d'innovations, la technologie est aujourd'hui largement mature. De l'aveu même des clients qui ont migré, comme des constructeurs ou des intégrateurs, les systèmes de téléphonie sur IP fonctionnent aujourd'hui aussi bien que les bons vieux PABX TDM, et ils apportent également de nouvelles possibilités riches de promesses pour les entreprises qui savent en tirer parti.
La mauvaise nouvelle est qu'un projet de téléphonie sur IP ne peut se mener aussi "simplement" que le déploiement d'un PABX traditionnel. La principale raison tient, bien entendu, à la nature convergente de la technologie. Les solutions de téléphonie sur IP requièrent pour leur déploiement la mise en oeuvre d'une multitude de compétences, notamment l'intervention d'experts en téléphonie, mais aussi d'experts en réseaux IP, ainsi qu'une conduite irréprochable de projet et une solide méthodologie de gestion du changement. Comme l'explique Laurent Auzély, directeur du centre de compétences Communications IP de Telindus Arche, "il n'y a plus de gros problèmes avec les équipements des différents fabricants, et il n'y a plus de problèmes fondamentaux côté technologie. En revanche, la réussite d'une migration vers la ToIP repose sur la rigueur apportée à la gestion du projet. Tout d'abord car il y a confluence de technologies (réseaux, téléphonie, informatique, sécurité) ; ensuite parce que l'on touche à un aspect fonctionnel en lien direct avec l'utilisateur."
En fait, la migration vers la téléphonie sur IP n'est pas vraiment un projet de téléphonie ou un projet télécoms, mais plutôt un vaste projet informatique, qui doit être géré comme tel. C'est ce que confirme Stéphane Buvat, le responsable réseaux et télécoms de Disney pour l'Europe : "La gestion de projets est l'un des aspects les plus importants d'un déploiement de solution de ToIP. [...] Il me semble préférable d'avoir un background informatique et réseau, car la convergence IP nécessite de comprendre les systèmes, la sécurité, ainsi que les aspects concernant la qualité de service. Ce sont autant de problèmes potentiels qui n'existent tout simplement pas en téléphonie traditionnelle. [...] Il faut également impliquer très tôt les utilisateurs car ce sont eux, au final, qui auront l'usage de la solution au quotidien."
En fait, côté clients comme côté fournisseurs, on s'accorde à dire que les principales raisons de l'échec de projets de téléphonie sur IP ne résident pas dans d'improbables carences de la technologie. Souvent, c'est plutôt dans l'ignorance des prérequis, dans la mauvaise conduite de projet ou encore dans la sous-estimation de l'impact des nouvelles solutions sur les habitudes des utilisateurs qu'il faut chercher les raisons d'un échec.
Afin de compiler une liste des meilleures pratiques à mettre en place lorsque l'on désire se lancer dans un projet de téléphonie sur IP, nous avons interrogé plusieurs dizaines d'intégrateurs et de clients en leur demandant quels étaient les principaux problèmes qu'ils avaient rencontrés et comment ils avaient su les contourner. Nous leur avons également demandé de nous détailler la méthodologie qu'ils ont mise en oeuvre dans le cadre de leur projet.
C'est une synthèse de ces avis et expériences que nous vous proposons tout au long de ces pages afin de vous permettre de mieux préparer votre projet ou du moins d'éviter certaines des erreurs les plus courantes. En quelque sorte un guide des meilleures pratiques pour appréhender avec succès les points critiques d'un projet de déploiement de ToIP...


Encadré :

Les grands comptes mieux armés que les PME

Si la taille de l'entreprise n'est pas forcément un obstacle dans le déroulement d'un projet de téléphonie sur IP, la mise en oeuvre d'une solution de ToIP est parfois plus compliquée dans une PME. Comme l'explique Laurent Auzély, directeur du centre de compétences Communications IP de Telindus Arche, "nous ne trouvons pas forcément dans les petites sociétés les bonnes compétences ou les bons interlocuteurs pour recueillir les informations nécessaires à la conduite du projet. En général, il nous faut dépenser beaucoup plus d'énergie pour expliquer et convaincre de la pertinence d'une solution de ToIP dans une petite structure." En fait, c'est globalement l'absence d'un responsable de projet qualifié en interne à la société qui pose problème lorsqu'il s'agit de dérouler les différentes étapes d'une migration
Laurent Auzély note ainsi que rares sont les PME qui disposent d'un inventaire précis de leurs ressources réseaux ou télécoms. De même, la gestion des plans de numérotation IP, essentielle pour la réussite d'un projet IP n'est pas forcément existante, et certains prérequis - comme la gestion de VLAN sur le réseau - ne sont pas en place. Un autre souci souligné par Christophe Courtois, responsable des activités ToIP de Nextira One, est lié aux contraintes budgétaires des PME : "Par exemple, la classe voix des offres MPLS des opérateurs est souvent trop chère pour les PME ou TPE multisites, ce qui peut poser des soucis de qualité de service." Un dernier problème est l'absence ou la rareté des solutions IP pour les sites d'entreprises de moins de cinquante salariés, la plupart des grands constructeurs s'étant jusqu'alors largement concentrés sur le marché des grands comptes. Pour ces entreprises reste alors la tentation du Centrex IP ou le recours à l'une des multiples solutions d'entrée de gamme au standard SIP, qui ont récemment fait leur apparition chez des constructeurs tels que BeWan, Linksys, D-Link, ou a des appliances Open Source telles que celle en cours de finalisation chez le Toulousain Lucyde...

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